Après deux mois passés au Brésil, dont une partie non négligeable à Sao Paulo, voici notre sentiment sur ce pays et plus particulièrement ses mégapoles.
Tout les guides vous le diront, Sao Paulo n’a pas le charme de Salvador, ici plus une pierre qui rappelle un passé lointain (au sens brésilien du terme, c’est-à-dire datant au plus tard du 17ème siécle), c’est le culte du neuf qui prévaut, et tous les édifices anciens étaient jusqu’à il y a peu détruits pour faire place à de l’utile ou du clinquant (des tours de 15 ou 20 étages pour les habitations ou les bureaux, des centres commerciaux, des rocades).
Le point de vue a peut-être changé récemment, mais il n’y a plus rien à sauver !
Ce qui frappe ici, comme dans tout le Brésil, mais plus encore qu’à Rio ou Salvador,
c’est le décalage terrible qui existe entre les classes sociales, on voit ainsi des Ferrari stoppées au coin d’une rue chic à quelques mètres d’un pauvre hère qui traîne une charrette de cartons, de cannettes ou de débris métalliques ou plastiques divers, dont il tirera juste de quoi se nourrir pour la journée.
Les classes les plus favorisées vivent dans des ghettos de riches qui ont pour noms :
Jardim Paulista, royaume des magasins de luxes qui rivalisent dans le domaine du kitsch (répliques de portiques Gréco-romain à tous les étages sur 30 niveaux par exemple).
Jardim America, aux villas apparemment somptueuses entourées de grands jardins tropicaux.
Ou Vila Madalena, plus tendance, le coin de tous les restos et bars branchés, aux villas plus simples et aux tours plus sobres qui abritent ce que la ville compte d’artistes et d’élite dite progressiste, mais jusqu'à un certain point seulement. On y trouve des marchés le samedi sympas et colorés.
Chacun de ces quartiers a son caractère propre, mais dans tous les cas, on ne peut que confirmer le sentiment dont un guide se faisait l’écho : les vainqueurs de la guerre économique ont gagné le pouvoir et l’argent, mais ont perdu leur liberté (à méditer…).
Tous ont cela en commun que les habitations y sont surprotégées (hautes grilles équipées de ligne haute tension et de sas d’entrée surveillés par des gardes parfois armés).
Et tous les riches y vivent dans l’angoisse permanente pour leur sécurité et celle de leurs proches.
On parle beaucoup du Brésil comme un pays qui est appelé à devenir l’une des grandes puissances de demain, mais ce qui nous a marqué, c’est qu’au fil des rencontres, et des discussions diverses à aucun moment il ne nous a semblé avoir affaire à un sentiment d’appartenance à un même pays des différentes couches sociales.
Les riches comparent leur situation à celle de leurs homologues européens en regrettant la violence qui les empêche de profiter de leur argent, mais ne souhaitent pas voir le niveau de vie des plus pauvres augmenter sensiblement (comment sinon, continuer à avoir un jardinier, un chauffeur ou une femme de ménage, comment faire tourner les usines si les ouvriers sont payés plus que les 120 euros auxquels ils peuvent prétendre).
Les politiques semblent rivaliser dans le domaine de la corruption, ou bien se servir le plus légalement du monde (quelques jours après notre arrivée, le journal local annonçait en première page que le gouverneur de Sao Paulo proposait d’augmenter les fonctionnaires de grades les plus élevés de 100 % à 200 %, jusqu’à un niveau de 7000 et 10 000 euros par mois, sans que cela soulève la moindre indignation).
Les pauvres semblent résignés à leur sort, tandis que les autres balaient notre étonnement d’un commentaire du type « le Brésil est un pays de contrastes ».
Bref, le Brésil sera peut-être d’ici peu une grande puissance, mais ce sera essentiellement parce que les puissants y seront plus puissants qu’ailleurs…
Cependant, la nature y demeure fabuleuse, riche et généreuse. Nous avons aimé nous y fondre…
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